Outils de Veille & Aide à la décision

Benchmarking des outils de veille. Etude réalisée par Jérome Bondu


David Commarmond


La problématique du choix d’un bon outil de veille et de la meilleure organisation possible est commune à tous les responsables d’un service d’intelligence économique. C’est pour essayer de répondre à ces questions que Jérôme Bondu a organisé une conférence dans le cadre du Club IES et intitulée : « Projet de veille - benchmarking, méthodologie, solutions logicielles et bonnes pratiques ».
Cette réunion proposait de faire le point sur les outils et plateformes de veille, ainsi que sur les pratiques et usages en entreprise. L’exposé était divisé en trois parties : Leviers techniques, leviers organisationnels et leviers humains.



Leviers techniques

En ponctuant son intervention de références et de questions à la salle, Jérôme Bondu a commencé par présenter différents outils de veille gratuits ou peu onéreux (Feddity, Nevibes, Alerti, Mention, …). Si on peut certes se débrouiller avec ces outils pour faire une veille, la question essentielle est de savoir à partir de quel moment il est plus rentables de mettre en place une plateforme professionnelle payante ! Il rappelle en effet que les outils de veille gratuits n'ont pas de coût financier, mais ils ont un coût humain lié notamment au temps nécessaires pour les paramétrer. Et ce coût, bien que masqué, est loin d’être négligeable.
Il faut donc trouver le point d'inflexion qui fera passer de l’écosystème de la gratuité à l’écosystème du payant. Ce point d’inflexion se définit notamment en fonction du nombre de sites, la fréquence de surveillance, le nombre de personnes impliquées, la personnalisation des livrables, …
 
Lorsque le choix est fait d’utiliser des outils professionnels, se pose un second problème : quel outil choisir !? Ce choix n’est pas facile. Et un des intérêts de l’étude que Jérôme Bondu vient de publier avec la Serda est de nous apporter des solutions :
D’abord, les plateformes de veille répondent à des logiques diffèrentes selon les éditeurs. Chaque fiche éditeur de l’étude rappelle l’originalité de chaque plateforme.
Ensuite, un graph en radar présente de manière macro les points forts de chacun des outils. Pour le réaliser, Jérôme Bondu a posé neuf questions aux éditeurs afin de les pousser à se démarquer.
Il obtient pour chaque éditeur un graphe comme celui présenté ci-dessous :

Pour la vision micro, chaque éditeur a répondu à un questionnaire comportant plus de 120 critères.

Ces critères vont des plus globaux aux plus techniques : le nombre d'années de commercialisation, chiffre d'affaires, répartition des ressources humaines, présence d'analyste ou non, … jusqu’à des informations sur les techniques de collectes, les types de surveillance, les outils embarqués d’analyse et de diffusion, l’interfaçage avec des RSE, les éléments de ROI…

Levier organisationnel

Au-delà du choix des outils, le benchmarking présente aussi des conseils organisationnels.
Et il commence par une réflexion sur le trajet de la « donnée informationnelle » dans les organisations et comment en faire un « renseignement » utile pour les collaborateurs : La « donnée informationnelle » peut se transformer en connaissance ou en renseignement selon les besoins, l’intérêt et le niveau préalable de connaissance du collaborateur qui la reçoit.

Selon l'état de connaissance préexistant, les « données informationnelles » trouvent une résonance particulière. La difficulté de la mise en place d’une bonne organisation de veille repose donc sur une bonne compréhension des besoins et du niveau de connaissances des collaborateurs.

D’où l’importance de faire une bonne analyse de l’existant, en amont du choix de l’organisation, mais aussi à intervalle régulier. L’analyse de l’existant passe naturellement par des entretiens avec les clients internes. Par le biais de petite scénettes vivantes, Jérôme Bondu nous a montré différents cas de figure, et différents types de réactions que peuvent avoir les clients interviewés. 

Leviers Humains

Une organisation, aussi pertinente soit-elle, repose toujours sur la volonté de ceux qui en font partie ! D’où le l’importance de s’intéresser au facteur humain.

L'humain est omniprésent, même dans les dynamiques très informatisés. Mais qui dit « humain » dit « biais cognitifs ». Car l’influence est partout : l’individu influence le groupe et le groupe influence l'individu. Jérôme Bondu a fait appel à des notions de psychosociologie pour illustrer son propos.
Par exemple : il arrive que l'image de l’intelligence économique (en tant que discipline) soit mauvaise dans une organisation. Comment peut faire le responsable veille pour redresser cette image, et enlever un étiquetage négatif ?
Des expériences en psychologie sociale montrent que des techniques comme la justification (technique du «démenti ») ne fonctionnent absolument pas. Il faut jouer sur d’autres leviers pour enlever l’étiquette négative.
 
Autre exemple : le responsable veille doit tenir compte d’un effet pervers lié à son activité : En effet, en diffusant largement des informations dans son organisation, il empêche du même coup les collaborateurs d’avoir un sentiment de différentiation. Sans rentrer dans les détails de sa démonstration, illustrée par des expériences du professeur Monteil, il en déduit que « la mise à disposition d'information non individualisée peut être vécue par la majorité comme démotivante » !
C’est selon lui un effet pervers totalement laissé de côté par la profession, mais qu’il faut adresser sous peine de passer à côté de ce que sera la veille des années à venir.
 


Cecité informationnelle

Dernier exemple : A quoi sert d’envoyer des signaux faibles à un manager qui est pris dans une « Escalade d'engagement » ?
Pour expliquer la cécité informationnelle des dirigeants, Jérôme Bondu évoque l’expérience de Milgram sur l’autorité : « des personnes enfermées dans un cercle vicieux de décisions, sous la pression du groupe se paralysent, et sous le poids des injonctions se cantonnent à un certain conformiste, ne reflétant pas les éléments clés identifiés par la veille ».
 
Il a aussi abordé le sujet peu débattu de la rétention d’information.

En conclusion, on peut dire qu’autant le benchmarking technique sur les outils que les réflexions sur l’organisation et le facteur humain sont des outils de prise de décision utiles pour les responsables veille.
 


« Projet de veille - benchmarking, méthodologie, solutions logicielles et bonnes pratiques »

NB : Pour en savoir sur l’étude « Projet de veille - benchmarking, méthodologie, solutions logicielles et bonnes pratiques » pouvez consulter la présentation en ligne sur www.inter-ligere.fr
L’étude est commercialisée par SerdaLab. 

Au sommaire de cette étude :
- Comparatif de 14 logiciels de veille et prestataires, selon 120 critères : AMI Software, Argus de la presse, Data Observer, Digimind, Iscope, Ixxo, KB Crawl, Eptica, Kantar media, Qwam, SindUp, Spotter, Synthesio, TrendyBuzz.
- 14 retours d’expérience menés auprès d’utilisateurs de plateformes de veille : Aéroports de Paris, CCI Saône-et-Loire, Crédit Agricole, Image&Dialogue Group, Limagrain, PagesJaunes, STMicroelectronics, Vecteur Plus et d’autres témoignages anonymes.
- Des chapitres et réflexions sur les aspects psychosociologiques de la veille. Un article sur les problématiques de la rétention d’informations en entreprise. Une présentation des actions clés de gestion de crise et de sécurisation des informations.

Le Club IES

NB : la prochaine conférence du Club IES (le 12 décembre à 19h30) portera sur la manipulation.
Durant cette conférence, Franck deCloquement démontrera comment des associations peuvent être instrumentalisées et être utilisées comme des outils d’influence pour faire pression sur des tiers, dès lors que des intérêts économiques ou stratégiques sont en jeux. Il présentera des analyses de cas :
- d’influence dans la sphère économique française,
- et de manipulation au niveau international. 

Voir l’agenda sur www.inter-ligere.fr