Personnalités

Oppscience, un acteur à l'appui des enquêteurs.


David Commarmond


Interview : M. Durand, vous venez de faire une présentation des applications développées par Oppscience, le 8 décembre dernier à ESS-E, centre de formation aux métiers de la sécurité dans le cadre des ateliers ANACRIM. Oppscience est l’un des acteurs montants dans le domaine, avec 5 ans d’existence, vous vous hissez avec Spectra comme un acteur incontournable de la sécurité.



DC : Lors de cet événement, vous avez illustré vos propos par les Jeux Olympiques 2024. En quoi ceux-ci sont importants pour vous ? Sont-ils un booster ?

JD : Les Jeux Olympiques et les grands événements à venir sur lesquels nous travaillons sont de formidables boosters. Bien évidemment nous comptons sur cette vitrine pour concourir à l’international pour conquérir de nouvelles parts de marchés.
 
Les tensions internationales qui traversent nos sociétés ont montré que les risques devaient être pris au sérieux. Cette prise de conscience est partagée par tous les acteurs de la chaîne Police-justice.
 
La complexité de ces transformations réside dans la multiplicité des dimensions, des changements d’échelles, des individus impliqués, de la nature des délits et crimes.
 
Notre défi s’appelle « data ». La mission d’Oppscience est de répondre aux besoins des enquêteurs.

DC : Pouvez-vous être plus précis ?

JD : Pour comprendre, il faut savoir que nous partions de très loin sur de nombreux points, une enquête peut nécessiter des dizaines/centaines d’enquêteurs et parfois certaines tâches demandaient des saisies manuelles pendant de longs mois, ce sont des tâches répétitives, à faible valeur ajoutée, moins glamours, mais essentielles. Avec l’évolution des législations, ce type de tâche tend à disparaître.
 
Dans les enquêtes les plus médiatiques, des PV d’auditions peuvent aboutir à la rédaction de centaines de milliers de pages, des milliers de supports audio, vidéo, etc dans des dizaines de formats.
 
L’affaire du petit Grégory, par exemple, est composée de centaines de milliers de pages dactylographiées qui ont dû être numérisées, mais aussi des audio sur bandes magnétiques. Au cours des années certains documents ont été perdus.
 
Dans des affaires plus récentes ou plus courantes, toutes ces informations doivent être aujourd’hui accessibles dans des délais toujours plus courts, pérennisées et stockées jusqu’au moment du procès.
 
Autre exemple de complexité, dans les enquêtes internationales, plusieurs langues peuvent se croiser, des langues connues ou inconnues, des dialectes, de l’argot, des références qui peuvent nous échapper. Une erreur de compréhension et en aval ce sont des centaines d’heures qui peuvent être consacrées à des tâches inutiles. Tout cela parce que le traitement en langage naturel est par nature difficile, imprévisible. Or ce magma d’informations est très riche, de nouvelles connexions peuvent se faire. Le mot clé est ici « formalisme », afin que lorsque l’on rédige des procès verbaux, chaque bloc de texte peut être traité de façon distincte. Que les éléments formels, sans intérêt initiant la procédure, puissent être écartés pour que les éléments clés comme les noms, les lieux puissent être identifiés, classés, enregistrés et comparés à des dictionnaires, des thésaurus. On obtient alors malgré la masse d’informations des temps de réponse très rapides.
 
Il y a cependant des limites juridiques et des principes imposés, la CNIL en étant l’un des garant qui doit être consulté pour que soit établi des règles de consultations et d’interconnexion entre les bases de données. Ce feu vert est essentiel pour garantir le respect des données personnelles.
 
Enfin dans les cold cases, la mémoire humaine est très limitée. Une fois les enquêteurs partis du service, il devient difficile de reprendre une enquête. Une preuve ou d’une découverte peut relancer une enquête. La découverte d’un os humain après examen ADN, par exemple, qui confirme la présence d’un disparu dans un lieu, qui des années auparavant avait fait l’objet de recherches infructueuses, peut être relancée. Avec cette mémoire on s’affranchit de cette limite.

DC : 2024 est bientôt là. Beaucoup de professionnels sont inquiets sur la livraison des infrastructures dans les délais, qu’en est-il de votre point de vue ?

JD : C’est clair que nous avons des délais et une pression qui se fait de plus en plus forte. Nous avons œuvré pour répondre aux défis que celui-ci nous imposait. Toutes nos équipes y travaillent.



DC : Quelles sont pour vous les clés du succès ?

JD : Le succès pour nous sera d’avoir contribué à l’absence d’incidents majeurs. C’est-à-dire pour la police et gendarmerie de pouvoir sécuriser l’accès aux sites, de pouvoir contrer les attaques cyber, de déjouer les tentatives de manipulations qui viendront d’États hostiles car, nombre d’acteurs seraient heureux de voir l’image de Paris atteinte et décrédibilisée. Image, qui affectera pour des années l’attractivité de la destination France.
 
La Russie, par exemple, a été particulièrement active sur les des fausses informations concernant les punaises de lit envahissant, soi-disant, Paris, afin de donner une mauvaise image de la ville avant les JO 2024.
 
On peut ajouter que c’est tout un écosystème qui est en mutation. En moins de dix ans, le monde de la sécurité et du renseignement s’est transformé. De confidentiel, il est devenu très visible. Il y a encore quelques années, il était inimaginable que les services de renseignements ou de police, recrutent de façon aussi visible.
 
Pour Oppscience, des événements, comme Milipol ou Agir, ont été des opportunités couronnées de succès.
Enfin, des mots et des expressions comme souveraineté, réindustrialisation, sécurité et patriotisme économique sont redevenues plus que des enjeux, des questions de société.

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