Vous avez dit "excellence académique" ?
Et la France dans tout cela ?
Si la hiérarchie interne reste stable, deux nouveaux entrants – l’Université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines et l’Université de Picardie Jules-Verne – portent à vingt-sept le nombre total d’universités françaises présentes dans le Top 1000.
Des "critères" qui mériteraient d'être mis à jour pour un outil conçu en 2003 !
Une méthodologie qui, si elle confère au classement une aura de rigueur, alimente aussi les critiques, notamment pour sa faible prise en compte des sciences humaines et sociales.
Derrière cette façade de rigueur méthodologique, l’outil conçu en 2003 par l’université Jiao Tong agit comme un prisme idéologique : obsession pour les prix Nobel et médailles Fields, culte des publications dans Nature ou Science, sacralisation de la bibliométrie… tout converge pour sacrer les mastodontes anglo-saxons et reléguer les sciences humaines au rang de disciplines invisibles. L’anglais s’impose comme lingua franca et sésame statistique, offrant un avantage mécanique aux chercheurs anglo-saxons, quand le modèle français, éclaté entre institutions, se voit dilué dans les classements.
On recule pas, mais on n'avance pas non plus...
Reste que, pour les universités françaises, figurer dans ce classement reste un levier stratégique de visibilité et d’attractivité sur la scène internationale, où chaque place gagnée ou perdue se lit comme un signal fort adressé aux chercheurs, aux étudiants et aux financeurs.
Cette mécanique entretient un double effet pervers : figer le paysage autour de quelques “grandes puissances” académiques et imposer un imaginaire de l’excellence centré sur la recherche dure, mesurable, immédiatement monnayable. Les universités qui brillent hors de ce spectre peinent à exister aux yeux d’un palmarès qui se veut universel mais agit comme un filtre culturel et géopolitique. Comme le souligne l’éditorial de L’Est Républicain, cette grille “favorise le patrimoine académique acquis plutôt que la dynamique actuelle” et accorde une prime disproportionnée aux publications anglophones.
Top 10 des meilleures universités françaises dans le classement de Shanghai 2025
Classement national / Université / Classement mondial
- Université Paris-Saclay (13ᵉ)
- Université PSL (34ᵉ)
- Sorbonne Université (43ᵉ)
- Université Paris Cité (60ᵉ)
- Université de Strasbourg (101–150)
- Aix-Marseille Université (151–200)
- Université Grenoble Alpes (151–200)
- Université de Montpellier (151–200)
- Institut Polytechnique de Paris (201–300)
- Université de Bordeaux (201–300)
Les effets “réels” sur inscriptions, recettes et partenariats apparaissent plutôt sur 12–36 mois. Les impacts territoriaux (logement, emplois étudiants, laboratoires, implantations d’entreprises) sont plus diffus et fortement médiés par les politiques locales. Globalement, les effets existent, mais ils sont hétérogènes selon la discipline, le niveau d’études, la capacité d’absorption (logements, bourses, visas) et l’exploitation marketing du signal.
L'influence d'abord !
Les États-Unis y demeurent archétypes de l’excellence, la Chine y trouve un levier d’affirmation, et le reste du monde, France comprise, négocie avec les règles du jeu plutôt que de les écrire.
Dans ce théâtre où les places se gagnent au prix fort, la mise en scène vaut autant que la performance.
A propos de la "Shanghai Ranking Consultancy"
A mes profs !! Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron
Dans La Reproduction, publié en 1970, Pierre Bourdieu et Jean‑Claude Passeron livrent une analyse implacable du rôle de l’école dans la perpétuation des inégalités sociales.
S’inscrivant dans la continuité de leur précédent ouvrage Les Héritiers, ils y développent la notion de « violence symbolique » : une domination subtile, exercée à travers le langage, la culture et les diplômes, qui finit par paraître légitime aux yeux même de ceux qui la subissent. Selon eux, le système éducatif, sous son vernis d’impartialité et de neutralité, agit comme une machine à reproduire l’ordre social établi, sélectionnant les élèves selon des critères qui avantagent structurellement les classes dominantes.
Ce faisant, elle masque les rapports de force derrière l’illusion du mérite individuel et de l’égalité des chances. L’ouvrage alterne analyses théoriques et observations concrètes, dessinant le portrait d’une institution dont le rôle dépasse l’instruction : elle est un rouage essentiel dans la conservation des hiérarchies sociales.