Enjeux majeurs

Entretien avec Jérôme Durand à l’occasion de la conférence du CANtm Club audiovisuel et numérique de Toulouse Métropole le 14.10.2025 de 17h45 à 20h.

Entretien animé par Isabelle Dreuilhe-Leiterer


Jacqueline Sala
Jeudi 9 Octobre 2025


L'expansion de l’intelligence artificielle nous interpelle : comment bâtir une IA digne de confiance, respectueuse de l’éthique, de la transparence et des droits fondamentaux ? Isabelle Dreuilhe-Leiterer a rencontré à cette occasion Jérôme Durand, intervenant et Directeur solutions Law Enforcement d'OPPSCIENCE.




Jérôme Durand, vous êtes Directeur des solutions Law Enforcement, Société OppScience (depuis 2023) et vous êtes un ancien de Direction centrale de la Police judiciaire. 
Votre mission est de permettre l’incorporation de technologies d’IA dans les organisations, comme dans les processus d’enquête, ce qui est devenu incontournable.
 
Vous contribuez à aider les forces de l’ordre et les avocats dans ces dossiers complexes et vitaux pour les familles de victimes et pour la société de manière générale.
 
Car votre logiciel d'investigations est capable de croiser l’ensemble des informations contenues dans les dossiers cold cases. Il permet un gain de temps considérable dans le traitement, le classement, l’analyse et le croisement des informations.
 

Vous proposez une solution d’IA dans l’analyse criminelle qui modifie les pratiques policières et judiciaires. Selon vous, est-ce que l’IA apporte une vraie réorientation des métiers liés à la sécurité, la justice ?

Oui l’IA apporte de nouveaux outils tels que l’analyse prédictive, la reconnaissance faciale, le traitement automatisé des données qui permet aux pratiques de devenir plus rapides et ciblées.

L’IA apporte aussi de nouvelles compétences, et un grand nombre de professionnels doivent se former à l’IA, aux données, et à l’éthique numérique.

Les métiers liés à la sécurité et à la justice répondent aujourd’hui à des enjeux éthiques et juridiques inédits. Et si peut être d’une grande aide, elle pose cependant des questions de responsabilité, de biais, et nécessite un cadre réglementaire adapté.

Et si les décisions peuvent être assistées, elles ne peuvent pas être déléguées : l’IA aide à décider, mais l’humain doit rester maître de la décision finale. 

Oppscience traite l’analyse des données massives, des images et vidéos, par la reconnaissance biométrique : comment envisagez-vous une évolution vers plus de frugalité digitale ?

Oui dans une certaine mesure, par l’optimisation des algorithmes. Nous utilisons des modèles allégés, moins gourmands en ressources comme la quantization, le edge computing, la détection événementielle.

Nous garantissons des infrastructures responsables, en choisissant des hébergements verts, en mutualisant les ressources, en limitant le stockage massif des vidéos.

Nous restons attentifs à la sobriété dans la collecte des données, en ne captant que les données nécessaires, privilégier l’anonymisation et la détection plutôt que l’identification.

Par ailleurs, nous sommes prudents quant au respect de la gouvernance éthique et réglementaire. Nous alignons les pratiques avec le RGPD, évaluons l’impact écologique des systèmes, assurons la transparence des algorithmes.
Et la culture d’entreprise reste « engagée » en sensibilisant les équipes, en intégrant des indicateurs de frugalité, en collaborant avec des partenaires durables. 

Selon vous, dans votre domaine d’activité, un digital souverain « made in France » est-il possible ? Que préconisez-vous pour favoriser les choix clients de solutions digitales françaises ou européennes : des coopérations, avec quels pays, et dans quelle langue pivot ?

Je pense qu’un digital souverain « made in France » est possible, mais il nécessite à la fois des coopérations européennes ciblées (France, Allemagne, Benelux, Espagne), des investissements publics pour soutenir l’innovation locale, et une stratégie d’achat responsable des administrations et entreprises.
 

Certaines conditions permettront de favoriser les choix de solutions digitales françaises ou européennes. Tout d’abord celle de travailler en anglais pour la recherche, mais garder le français comme langue de confiance pour les interfaces et la communication locale. Mais aussi valoriser la transparence, la sécurité et l’éthique des solutions européennes. Enfin, il faut encourager les alliances industrielles souveraines (ex. : Gaia-X).

Vous agissez en aéroport avec l’analyse des empreintes digitales, avec votre application intégrée dans Spectra, appelée « Vision augmentée ». Cette solution pourrait-elle adaptée aux collectivités, centres commerciaux, Ecoles pour apporter de l’identification, de la prévention, de la protection et donc une plus grande sécurité pour tous ?

Après les forces de l’ordre et les avocats, nos solutions peuvent aujourd’hui — et surtout demain — s’adapter à d'autres métiers à haut besoin de sécurité, de traçabilité et d’aide à la décision.
 

Les professions et secteurs prioritaires auxquels nous nous adressons sont telles que :
 

  1. La Justice & le pénitentiaire, par la sécurisation des flux internes, le contrôle biométrique des entrées/sorties.
  2. La Santé par l’authentification des personnels médicaux, contrôle d’accès aux zones sensibles comme par exemple les blocs opératoires, la pharmacie hospitalière.
  3. Le transport & la logistique par le suivi des agents, contrôle biométrique dans les hubs stratégiques, en gares et ports.
  4. L’énergie & sites sensibles par l’identification renforcée dans les centrales ou sites à accès restreint.
  5. La sécurité privée par l’aide à la levée de doute, reconnaissance sur site, automatisation des signalements.
     
La solution "Vision augmentée" est techniquement et fonctionnellement adaptée à des lieux comme les collectivités, centres commerciaux ou écoles, à condition d’en garantir un usage éthique, proportionné et transparent. »
 

En conclusion, quelles sont les tendances et perspectives à observer, quelles précautions prendre pour une IA de confiance, tout en restant frugal, durable et souverain dans la mesure du possible ?

Pour construire une IA de confiance, frugale et souveraine, il faut allier performance technologique et responsabilité éthique, adopter une approche modulaire et contextuelle des usages, soutenir des écosystèmes locaux et européens, et toujours garder l’humain au centre de la décision.  
 
 

Merci Jérôme Durand pour cet éclairage spécialiste.


Entretien mené par
Isabelle Dreuilhe-Leiterer,
Consultante internationale spécialisée en Transformation numérique

A PROPOS DE OPPSCIENCE

 www.oppscience.com

Contact : Jérôme Durand  jerome.durand@yahoo.fr   T. 06 77 31 80 87
 

Pour suivre cette conférence

En téléconférence sur votre ordinateur : https://meet.google.com/nqb-ndpo-nif
En direct sur YouTube : https://youtube.com/live/177UxGjGxN8

Vous pourrez alors suivre la conférence avec possibilité d'intervention par messagerie.

L’enregistrement vidéo sera disponible ultérieurement sur la chaîne YouTube du club