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Regardez ! L'Ère de la Post-Vérité : Quand l'Information Devient une Nouvelle Arme Stratégique


David Commarmond
Lundi 17 Novembre 2025


Le podcast Résilience plonge au cœur d’une confrontation contemporaine, décrivant une « guerre silencieuse, sans bombe, sans uniforme, mais tout aussi violente : la guerre de l'information ». Au centre de ce débat se trouve une question fondamentale : Qui détient la capacité de rédiger le récit du monde ?. L'émission, qui met l'accent sur son indépendance éditoriale ("nos seuls patrons c'est vous"), s'interroge sur l'existence même d'une vérité factuelle face à des "vérités concurrentes" et explore comment l'information et l'Intelligence Artificielle (IA) se transforment en « nouvelles armes stratégiques ».



L'Intervenant : Guillaume David, Expert des Contextes Hybrides

L'invité de cet épisode est Guillaume David Deniel, expert reconnu des enjeux stratégiques liés à l'information et aux technologies de défense, ainsi qu'à leur utilisation par les gouvernements.
 
Guillaume David a un parcours marqué par l'analyse des menaces numériques et stratégiques. Il a notamment rejoint en 2018 le Think tank français Liberté et Prospective – une organisation visant à traiter les sujets d'antiterrorisme et de maintien de l'ordre – où il est responsable des thématiques technologiques et numériques. Il est également Directeur des sujets de défense à l'Institut international d'intelligence stratégique et de lobbying. Son champ d'expertise est vaste, couvrant la guerre de l'information (inteformation), la cybersécurité, les cyberarmes, ainsi que la stratégie et les opérations d'influence dans des contextes hybrides. En outre, il a été intégré comme conférencier auprès de l'agence d'avenir Avra, anciennement officier du Mossade.
 
Son objectif au sein du podcast est d'aider à comprendre les mécanismes à l'œuvre lorsque l'information se mue en puissance, et par extension, en arme.

L'Enjeu Stratégique : Le Contrôle de l'Information est le Pouvoir

L'analyse de Guillaume David repose sur une généalogie de l'information en tant que source de pouvoir, reliant l'Antiquité aux théories stratégiques modernes.

L'enjeu central est clair : « le contrôle de l'information c'est le pouvoir, la liberté de l'information c'est la démocratie ». Un individu est libre lorsqu'il peut échanger, débattre et prendre une décision éclairée par rapport à une information.
L'orateur remonte à Socrate et Platon, où la vérité guidait l'État, bien que la manipulation ait parfois été utilisée pour maintenir la cohérence de la cité. Il faut attendre le XVIe-XVIIe siècle, avec Machiavel et Francis Bacon, pour voir émerger la notion que « le savoir est un pouvoir » et que la manipulation permet de garder l'ascendant sur les hommes.
 
Ce concept est actualisé et transformé par deux théoriciens américains :
  1. Zbigniew Brzezinski (via la notion de tectronique). Au début des années 2000, l'utilisation de l'information par les systèmes électroniques (informatique, réseaux sociaux) donne aux États la capacité de connaître les désirs et les besoins de leur population. En fournissant ensuite la « bonne information » correspondant à ces besoins, l'État est capable de la contrôler. De plus, Brzezinski introduit l'idée que l'information est désormais un pouvoir géopolitique global, capable d'être diffusée internationalement.
     
  2. Alvin Toffler : Il définit l'entrée dans un nouvel âge, l'âge informationnel, distingué de l'agriculture et de l'industrialisation. Toffler établit trois formes de pouvoir : la force, l'économie et l'information. La conclusion majeure est que le pouvoir par la force est devenu trop risqué et coûteux, et qu'il peut être dominé par le pouvoir informationnel. Mieux encore, le pouvoir informationnel est essentiel au pouvoir économique, ce qui signifie qu'aujourd'hui, « le pouvoir informationnel [...] contrôle et le pouvoir physique et le pouvoir économique ».
Aujourd'hui, les États préfèrent clairement utiliser le pouvoir informationnel (le smart power), plus efficace et moins coûteux en vies et en destructions que le pouvoir de la force. Cela conduit à une réalité où les « guerres de demain ne seront-elles pas gagnées par ceux qui mentent le mieux plutôt que par ceux qui se battent le plus courageusement ? ».

La Fragilité de la Vérité et la Menace Démocratique

Dans ce contexte de guerre informationnelle, la vérité est devenue un « champ de bataille ». Guillaume David cite Pascal : « la vérité est si obscure en ce temps et le mensonge si établi qu'à moins d'aimer la vérité on ne saurait la reconnaître ».

La vérité se trouve dans le factuel, mais la manipulation réside dans l'interprétation des faits. L'enjeu est rendu complexe par les outils numériques :
  1. Les Mèmes : ils permettent de se moquer d'un fait réel, utilisant l'émotion et l'ironie pour orienter la perception collective.
  2. Les DeepFakes : ces vidéos truquées par l'IA sont capables de changer un fait réel. Leur puissance est de court-circuiter notre confiance historique dans le visuel et le sonore, car « voir et entendre ne sont plus des garanties ».
Même des instituts renommés peuvent communiquer des informations manipulées, comme cela a pu être observé lors de la crise de la Covid.
 
Si les citoyens ne développent pas leur sens critique, l'humanité court le risque d'un « contrôle des masses ». Les individus pourraient se retrouver piégés dans les réseaux sociaux à écouter uniquement des influenceurs et leur propre communauté, conduisant à un clivage de la société et au renfermement sur soi. Pour rester libre et maintenir la démocratie, l'homme doit continuer à travailler sa connaissance, son sens critique, et accepter l'échange et la confrontation des mots pour forger sa propre idée.
 
Pour contrer cette déferlante, il est essentiel de se doter des outils technologiques adéquats et de la volonté politique nécessaire. Par ailleurs, l'utilisation de l'Intelligence Artificielle, comme l'outil Grok sur la plateforme X, peut aider le citoyen à vérifier la véracité des informations, leur tendance et leur origine.
 
En conclusion, si l'électricité a accompagné la révolution industrielle, les systèmes d'information, l'électronique et l'IA constituent la nouvelle « puissance invisible » de l'information.

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