Dans cet article, Anne Laurain, gastro-entérologue et hépatologue, exerçant au sein du groupe hospitalier privé Ambroise Paré-Hartmann, nous propose une synthèse des perspectives, solutions et précautions à observer dans une démarche d'Intelligence artificielle en médecine. "Loin de remplacer l’humain, l’IA paraît s’inscrire, dans la pratique, comme un soutien analytique puissant qui augmente les capacités d’agir des praticiens au profit des patients. "
Elle confirme ainsi qu'en affinant les diagnostics et en accélérant la prise en charge, l'IA débusque en radiologie des anomalies invisibles à l’œil nu, anticipe en psychiatrie les troubles de l’humeur et les risques suicidaires, et révèle les marqueurs d’infertilité associés à l’endométriose.
Au-delà du soin, elle révolutionne la recherche pharmacologique en identifiant de nouvelles molécules grâce à des algorithmes capables d’explorer des millions de structures chimiques.
Dans les blocs opératoires, elle ajuste en temps réel les repères anatomiques pour réduire les complications, et dans les services d’urgence, elle surveille en continu les paramètres vitaux pour optimiser les interventions.
Ce panorama met en lumière ces avancées, tout en soulignant les défis qui restent à relever pour faire de l’IA un atout au service des patients.
L’intelligence artificielle a multiplié les démonstrations de son impact, parfois paradoxal. Exemples...
Une équipe de l’université de Bonn a ainsi révélé que les grands modèles de langage, loin d’être infaillibles, simplifient à l’excès les avancées scientifiques et doublent leur taux d’erreurs quand on leur demande plus de précision.
Parallèlement, le rapport IA Index 2024 de Stanford met en évidence l’irrésistible essor de ces technologies à l’échelle mondiale, avec des coûts de formation en flèche et une domination croissante du secteur industriel sur la recherche.
Dans le domaine médical, l’apprentissage automatique décèle aujourd’hui un phénotype d’infertilité lié à l’endométriose et, au MIT, un algorithme fouillant un milliard de structures chimiques a conduit à la découverte de l’halicine, un nouvel antibiotique prometteur contre les bactéries multirésistantes.
Enfin, la psychiatrie bénéficie elle aussi de l’IA, exploitant les capteurs de smartphone et le deep learning pour détecter les premiers signes de dépression et de risque suicidaire avec plus de 85 % de précision.
L'IA soulève déjà des questions fondamentales que seule une législation adaptée pourra trancher.
Loin de chercher à supplanter les médecins, ces outils numériques visent à renforcer leur expertise en les délestant de certaines tâches complexes ou répétitives. Ils ne remplacent ni l’examen clinique, ni la finesse de la relation humaine, mais viennent en appui de la prise de décision et de l’analyse, notamment dans le diagnostic précoce grâce à l’imagerie ou le suivi automatisé de certaines pathologies.
Ce n’est donc pas une rivalité entre intelligence artificielle et humaine qui se joue, mais une alliance complémentaire au service d’une médecine personnalisée, où les soignants conservent toute leur place et, mieux encore, voient leurs capacités amplifiées.
A propos d'Anne Laurain
Anne Laurain est gastro-entérologue et hépatologue au sein du groupe hospitalier privé Ambroise Paré-Hartmann.
Présidente de la commission E-santé du CREGG, elle s’engage activement dans l’essor des technologies numériques en médecine.