STRATEGIES

La revue nationale stratégique nouvelle est parue.


Jacqueline Sala
Lundi 21 Juillet 2025


La nouvelle revue nationale stratégique est parue, et si elle ne promet pas de révélations fracassantes, elle offre une lecture dense, presque méditative, pour accompagner les heures estivales. Ce document s’ancre dans une forme de lucidité bienvenue : celle d’un regard enfin réaliste sur les menaces qui pèsent, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières.




Mais cette clairvoyance s’arrête là où commence l’action. Car si le diagnostic est posé avec sérieux, les remèdes proposés semblent tout droit sortis d’une boîte à outils usée. L’appel au changement se heurte à une mécanique institutionnelle qui peine à se réinventer. 

Quant à l’implication des investisseurs privés dans le financement de la Défense, le texte reste dans l’incantation. L’innovation est invoquée, mais sans véritable levier ni stratégie pour canaliser l’élan entrepreneurial né depuis le 20 mars. Une occasion manquée de transformer l’effervescence en force structurante.

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Ce qui frappe d’abord, c’est la reconnaissance explicite d’un environnement géopolitique dégradé, où la conflictualité ne relève plus de l’hypothèse mais du quotidien.

La Russie y est désignée sans détour comme une menace directe, tandis que d’autres puissances comme la Chine, l’Iran ou la Corée du Nord sont évoquées avec une gravité qui tranche avec les prudences diplomatiques d’antan.

Mais au-delà des adversaires extérieurs, le texte s’attarde sur les failles internes. Il évoque le retour de la menace djihadiste, la montée de la criminalité organisée, les cyberattaques qui ciblent désormais les hôpitaux comme les collectivités locales, et les fractures sociales qui érodent la cohésion nationale. Ce diagnostic sans fard donne à la revue une tonalité presque introspective, comme si l’État reconnaissait enfin que la résilience ne peut être décrétée, mais doit être construite dans la durée.


L’un des points les plus marquants réside dans la volonté de mobiliser la société tout entière.

L’engagement citoyen n’est plus un supplément d’âme, mais une nécessité stratégique.
La transformation de la Journée défense et citoyenneté, la création d’une Garde nationale rénovée, et la territorialisation des efforts traduisent une volonté de faire descendre la défense dans les bassins de vie. L’État ne parle plus seulement aux militaires, mais aux citoyens, aux entreprises, aux associations, aux collectivités. Il cherche à tisser un maillage de sécurité qui dépasse les murs des casernes.

La revue insiste aussi sur la préparation économique à la guerre. Elle évoque une réserve industrielle de défense, des capacités de production renforcées, et une économie capable de pivoter en cas de crise majeure. Ce thème, longtemps marginal, devient central dans une époque où la guerre ne se joue plus seulement sur les champs de bataille, mais dans les chaînes logistiques, les réseaux numériques et les laboratoires de recherche.


Enfin, la RNS 2025 tente de réconcilier défense et innovation.

Elle mise sur l’excellence académique et scientifique, sur la souveraineté technologique, et sur une culture de la résilience diffusée à l’échelle nationale. Mais cette ambition ne pourra se concrétiser que si elle s’incarne dans un récit partagé, dans une confiance retrouvée entre l’État et les citoyens. Car sans adhésion, même les meilleures stratégies restent lettre morte.

A propos de la Revue Nationale Stratégique

La Revue nationale stratégique est un document de référence qui définit les grandes orientations de la politique de défense et de sécurité de la France. Commandée par le Président de la République, elle est actualisée en fonction des évolutions géopolitiques majeures. Celle de 2025 trace une feuille de route ambitieuse pour adapter le pays à un environnement international marqué par des tensions accrues, en affirmant une vision globale de la défense qui mobilise l’État, les citoyens et les acteurs économiques. Elle vise à renforcer la souveraineté, la résilience et la capacité d’action de la Nation à l’horizon 2030.