STRATEGIES

Lire le monde à travers la géopolitique. L'exemple du Mercosur.

Géopolitique : cette force qui bouleverse tout de Charles Salvaudon (Éditions Baudelaire)


Jacqueline Sala
Vendredi 19 Décembre 2025


Le livre Géopolitique : cette force qui bouleverse tout de Charles Salvaudon (Éditions Baudelaire, juillet 2025) propose une lecture claire et accessible des tensions mondiales contemporaines, en montrant comment la géopolitique agit comme une force souterraine qui façonne nos vies et celles de nos enfants.




penser géopolitiquement

Guerres, migrations, crises énergétiques, tensions identitaires ou climatiques… chaque bouleversement révèle une force discrète mais décisive qui façonne nos sociétés. Dans un monde fragmenté, penser géopolitiquement n’est plus une option, mais une urgence.
Avec Géopolitique : cette force qui bouleverse tout, Charles Salvaudon propose une approche claire et accessible, invitant chacun à repenser les dynamiques de confrontation et d’interconnexion qui redessinent la planète. Expert reconnu, formé à l’Ambassade de France à Washington avant de poursuivre une carrière internationale, il accompagne aujourd’hui dirigeants et gouvernements tout en transmettant son savoir aux nouvelles générations.

Penser le monde en tension

Très accessible, cet ouvrage éclaire les interconnexions et les confrontations qui marquent notre quotidien. Il rappelle que la géopolitique n’est pas une discipline abstraite, mais une force qui agit sur nos vies, qu’il s’agisse de l’énergie que nous consommons, des migrations qui recomposent nos territoires ou des conflits qui résonnent jusque dans nos démocraties.

Influence géopolitique invisible

De nombreux exemples illustrent cette puissance souvent invisible.

Les routes commerciales sous tension. En 2025, les attaques contre des navires en mer Rouge et les blocages liés aux conflits au Moyen‑Orient ont perturbé les chaînes d’approvisionnement mondiales. Derrière ces incidents militaires, c’est la géopolitique qui agit : une rivalité régionale qui se traduit par une hausse des coûts logistiques et une inflation importée

On pense aussi aux élections mondiales et à l’instabilité politique permanent. Plus de 70 pays ont connu des scrutins en 2024‑2025, représentant plus de la moitié du PIB mondial. Cette vague électorale a accentué les fractures sociales et politiques, provoquant des recompositions inattendues (Afrique du Sud, Royaume‑Uni, Allemagne). La géopolitique se manifeste ici comme une force qui fragilise la cohésion sociale et reconfigure les alliances.

Mais également comment ne pas être frappés par la recomposition multipolaire en cours. L’élection de Donald Trump en janvier 2025 a relancé une approche transactionnelle des relations internationales. Combinée aux conflits persistants en Ukraine et au Moyen‑Orient, cette orientation accentue la fragmentation de la mondialisation et pousse les entreprises à repenser leurs stratégies. La géopolitique agit en profondeur, en modifiant les règles du commerce et de la coopération internationale. 

Ces exemples parmi tant d'autres  montrent que la géopolitique ne se limite pas aux champs de bataille ou aux sommets diplomatiques. Elle agit dans les flux commerciaux, les prix de l’énergie, la stabilité sociale et la confiance des marchés. Les citoyens en ressentent les effets au quotidien — hausse des prix, incertitude politique, tensions identitaires — sans toujours percevoir la mécanique géopolitique sous‑jacente.

Le Mercosur en ligne de mire : test de cohérence pour l’Europe

Au moment où environ 7 300 à 10 000 agriculteurs européens ont manifesté à Bruxelles le 18 décembre 2025 contre l’accord UE‑Mercosur, accompagnés de près de 950 tracteurs, quelles réponses la géopolitique peut-elle nous apporter ?

L’accord de libre‑échange entre l’Union européenne et le Mercosur, négocié depuis plus de vingt‑cinq ans, apparaît pour Charles Salvaudon comme un révélateur des contradictions européennes. D’un côté, il offre des opportunités économiques réelles : l’UE est déjà le deuxième partenaire commercial du Mercosur et l’accord renforcerait sa présence face aux influences américaine et chinoise. Il comporte aussi des clauses environnementales et sociales qui pourraient servir de levier normatif.

Mais Charles Salvaudon souligne les limites : une opposition agricole forte en France et en Italie, la crainte d’une concurrence déloyale, et la fragilité institutionnelle du Mercosur, union douanière sans véritable intégration politique. Pour lui, l’enjeu dépasse la seule économie : il s’agit d’un test de cohérence pour l’Europe, sommée de concilier ses intérêts nationaux avec une ambition géopolitique globale.

En définitive, l’accord UE‑Mercosur est perçu comme imparfait mais stratégique : un instrument de realpolitik qui met en lumière la difficulté de l’Europe à conjuguer normes, souveraineté et influence internationale. Bonne nouvelle : l'Italie vient d'apporter son soutien à la France !


A propos de l'auteur

Charles Salvaudon, expert en géopolitique au CEDE‑ESSEC et professeur à l’Albert School, a débuté sa carrière à l’Ambassade de France à Washington avant de rejoindre de grandes entreprises et cabinets de conseil. Auteur de Géopolitique : cette force qui bouleverse tout (Éditions Baudelaire, 2025), il accompagne aujourd’hui dirigeants et gouvernements tout en formant les nouvelles générations aux enjeux géopolitiques.