Nos modèles productifs face aux enjeux de transformation : quels défis pour l'avenir ?

Les modèles productifs français et européens sont pris dans un tourbillon de mutations qui redessinent leurs fondations.
Les tensions géopolitiques rebattent les cartes de l’autonomie stratégique, obligeant à repenser les chaînes de valeur et à réduire des dépendances devenues fragiles.
Dans le même temps, l’urgence climatique impose de conjuguer performance économique et soutenabilité, de produire sans épuiser les ressources, de transformer sans détruire. Et tandis que la technologie, la démographie et les aspirations citoyennes évoluent à vive allure, la société réclame plus de qualité de vie, de résilience et d’inclusion. C’est à ce carrefour, où se mêlent contraintes et opportunités, que se joue l’avenir de notre appareil productif.

Les compétences humaines doivent évoluer au rythme des mutations technologiques et industrielles, tout en rendant les métiers plus attractifs et en accompagnant les transitions professionnelles dans un marché du travail en perpétuel mouvement. Les flux financiers, eux, doivent être orientés vers des secteurs à la fois stratégiques et durables, où chaque investissement répond à un impératif de sobriété et d’efficacité. Enfin, l’organisation même des acteurs économiques est appelée à se réinventer : plus de souplesse dans les structures, davantage de coopération entre sphères publique et privée, et une gouvernance capable d’innover pour s’adapter aux défis à venir.

C’est dans cette articulation fine entre talents, capitaux et organisation que se joue la capacité à produire et innover face aux bouleversements en cours.

En se projetant à l’horizon 2040, Futuribles esquisse cinq trajectoires possibles qui dessinent autant de futurs pour les modèles productifs français et européens.

Dans la première, la relocalisation massive ramène sur le sol national ou européen les activités jugées stratégiques, réduisant ainsi les dépendances extérieures et renforçant la souveraineté économique.
La seconde imagine une économie circulaire généralisée, où chaque ressource est optimisée, réparée, recyclée, et où l’éco‑conception devient la norme.
La troisième mise sur une innovation technologique radicale : intelligence artificielle, biotechnologies, énergies renouvelables… autant de ruptures capables de créer de nouveaux avantages compétitifs.
La quatrième parie sur une coopération renforcée, multipliant les alliances entre acteurs publics et privés, et tissant des partenariats européens pour mutualiser moyens et savoir‑faire.
Enfin, la cinquième envisage une adaptation sociétale profonde, où les modèles productifs s’alignent sur les valeurs sociales et environnementales, avec une implication active des citoyens et des territoires.

Autant de visions qui, chacune à leur manière, interrogent notre capacité à choisir la voie la plus résiliente et la plus porteuse pour l’avenir.

D’un côté, l’industrie automobile européenne, engagée dans une course déterminante vers l’électromobilité, doit relever le triple défi de former de nouvelles compétences, de mobiliser des investissements massifs et de préserver une souveraineté industrielle mise à l’épreuve par la concurrence mondiale. De l’autre, les modèles productifs en santé affrontent une équation complexe : répondre à une demande de soins en constante augmentation, intégrer les innovations médicales les plus récentes et pallier la pénurie de personnel, tout en maintenant un accès équitable pour l’ensemble de la population.

Pour nourrir cette réflexion, le CESE a orchestré en janvier 2025 une journée d’ateliers prospectifs, confiée à l’expertise de Futuribles. Dans cet espace d’échanges, les représentants de la société civile ont pu s’approprier les scénarios proposés, les confronter à leurs réalités et formuler des orientations jugées souhaitables. Les analyses issues de ces travaux, consignées en annexe du rapport, offrent bien plus qu’un simple complément : elles constituent une véritable boussole pour anticiper les choix stratégiques qui façonneront les décennies à venir.

Ce travail collectif trace les contours d’une feuille de route ambitieuse : penser l’économie comme un tout, anticiper plutôt que subir, et unir les forces de tous les acteurs pour bâtir des modèles productifs capables de résister aux chocs tout en restant compétitifs.
C’est un appel à conjuguer vision de long terme et action immédiate, à faire dialoguer l’économique, le social et l’environnemental dans une même dynamique. Les pages du rapport et ses éclairages prospectifs, accessibles en ligne, offrent à chacun les clés pour prolonger la réflexion et participer, dès aujourd’hui, à façonner l’avenir.