Intelligence artificielle

"Transformer la nation américaine en « République technologique ». Une lecture d’Alex Karp". L'analyse de Christophe Deschamps


Jacqueline Sala
Samedi 17 Mai 2025


Pour Alex Karp, PDG de Palantir, l’intelligence artificielle est désormais un levier stratégique comparable à l’arme atomique. Elle n’est plus une technologie émergente mais une réalité structurante, qu’il faut intégrer de manière lucide dans les choix politiques et militaires. Dans son livre, il plaide pour un patriotisme technologique, où les projets s’inscrivent dans une logique nationale et collective.




L'analyse de Christophe Deschamps, Outils Froids

 Dans l’article qu’elle consacre à The Technological Republic, Anne Dias propose une lecture synthétique de l’ouvrage d’Alex Karp, PDG de Palantir. Il y défend l'idée d'une alliance étroite entre souveraineté étatique et puissance technologique, en rupture avec le discours traditionnel d’une Silicon Valley qui, selon lui, se considérait comme apolitique depuis trop longtemps. Il y plaide donc pour un patriotisme technologique, où les projets s’inscrivent dans une logique nationale et collective.

Pour Karp, l’intelligence artificielle est désormais un levier stratégique comparable à l’arme atomique. Elle n’est plus une technologie émergente mais une réalité structurante, qu’il faut intégrer de manière lucide dans les choix politiques et militaires. Ce réalisme technologique rompt avec une vision de l’innovation centrée sur la seule efficacité économique.

Alex Karp insiste également sur l’importance du débat d’idées dans les sociétés démocratiques. Contre le relativisme, il défend la dissension intellectuelle comme moteur de performance et d’innovation. Loin de chercher le consensus à tout prix, il défend l’idée que la vitalité démocratique repose sur une confrontation féconde des visions. Une évidence diraient certains. Pas tous.

Enfin, Karp en appelle à une Europe capable de dépasser son attentisme stratégique, de renouer avec une véritable culture du risque, et de se doter d’une stratégie de puissance à la mesure des mouvements géopolitiques actuels.

Un positionnement intellectuel assumé, clivant, et profondément ancré dans une vision du monde où  technologie et souveraineté doivent être indissociables.

À lire évidemment, sauf si l'on a peur de se brûler au feu des idées…

The Technological Republic: Hard Power, Soft Belief, and the Future of the West Hardcover – February 18, 2025

Dans *The Technological Republic: Hard Power, Soft Belief, and the Future of the West*, Alexander C. Karp, cofondateur et PDG de Palantir Technologies, accompagné de Nicholas W. Zamiska, dresse le constat d'un Occident qui aurait perdu son ambition technologique, tandis que la Silicon Valley se complaît dans des innovations superficielles.

Selon Karp, les ingénieurs et entrepreneurs, autrefois à l’avant-garde du progrès, se détournent désormais des défis stratégiques pour privilégier des développements orientés vers le marketing et les applications grand public. Une tendance qui, d’après lui, fragilise la suprématie des États-Unis et de leurs alliés sur la scène internationale.

L’auteur plaide en faveur d’une réorientation technologique au service de la souveraineté et de la sécurité nationale, notamment face aux risques posés par l’intelligence artificielle et la guerre numérique. Il insiste sur l’urgence d’un partenariat renforcé entre entreprises technologiques et gouvernements pour préserver les libertés fondamentales et la stabilité géopolitique.

À mi-chemin entre critique et manifeste, cet ouvrage exhorte les leaders du secteur à renouer avec une vision plus ambitieuse et stratégique de l’innovation, à même de redéfinir l’avenir du monde occidental.